
La Grande Tranchée des bagnards
Lieu emblématique du canal de Nantes à Brest, la Grande Tranchée incarne l’effort titanesque déployé pour sa construction au XIXᵉ siècle.
Creuser la roche à cet endroit mobilisa 4000 ouvriers, majoritairement des prisonniers du bagne de Brest, qui travaillèrent pendant 9 ans pour permettre au canal de relier les bassins versants voisins.
Un chantier titanesque
Conçu pour contourner le blocus anglais sur les côtes bretonnes et dynamiser l’économie du centre de la Bretagne, le canal de Nantes à Brest a grandement facilité, une fois achevé, le transport des marchandises. Les péniches acheminaient les produits agricoles et artisanaux en aval vers les ports et grandes villes comme Nantes, Redon et Pontivy, ou en amont vers Brest et Châteaulin, reliant ainsi efficacement l’arrière-pays aux principaux axes économiques.
Quelques chiffres pour se rendre compte du chantier impressionnant que fut le creusement de la Grande Tranchée :
- Longueur de la tranchée : 2.5 km
- Largeur : 100 m de large au sommet
- Hauteur : 23 m
- Durée des travaux : 10 ans
- Quantité de terre déplacée : 3 millions de m3
- Ouvriers ayant œuvré au creusement : 4000
- Altitude : 184 mètres, point culminant du canal de Nantes à Brest
Les ouvriers, qu’ils soient bagnards ou travailleurs libres, se rendaient au chantier dès l’aube et y demeuraient jusqu’au crépuscule.

Les ouvriers
La construction du canal de Nantes à Brest, au début du XIXe siècle, fut un projet colossal qui mobilisa une grande main-d'œuvre. Bien que les bagnards représentaient une part significative des ouvriers, ils n’étaient pas les seuls sur le chantier de la Grande Tranchée de Glomel. Au total, environ 4000 forçats travaillèrent sur le site entre 1823 et 1832, avec un effectif variant de 300 à 650 bagnards à un moment donné, complété par jusqu'à 800 ouvriers libres.
Jour après jour, ils excavaient des tonnes de terre. Les premières couches furent relativement faciles à extraire, grâce à des rampes et des chariots conçus pour transporter la terre et la roche. Cependant, au fur et à mesure que la profondeur augmentait, l’utilisation des chariots devenait impraticable. Il devint alors nécessaire de transporter la terre à dos d’homme, à l’aide de paniers en osier.
Les prisonniers étaient logés dans un camp construit sur les hauteurs du canal, nécessitant une surveillance rigoureuse. L’ingénieur Lecor, confronté à des actes de rébellion et de vol parmi les bagnards, mit en place un contrôle strict et imposa des punitions sévères, envoyant les fauteurs de troubles au cachot. En complément, des ouvriers libres furent recrutés, incluant des maçons, des charpentiers, des couvreurs, ainsi que de nombreux anciens prisonniers des galères, ce qui ajoutait une instabilité au sein des travailleurs. De nombreuses tensions sociales se succédèrent.
Le labeur sur ce chantier titanesque était particulièrement difficile, les hommes devant remonter sur leur dos de lourdes charges de terre et de roche sur les flancs de la colline. Les maladies et les accidents, dus aux conditions de travail, ponctuèrent ces neuf années. Au camp, les conditions de vie étaient abominables : imaginez les dormir dans des hamacs superposés, sans chauffage, sans eau, sans éclairage, dans des bâtiments de bois !
Ce fut finalement la peur d’une épidémie de choléra en 1832 qui mit un terme au camp des prisonniers. Les bagnards restants furent évacués vers la presqu’île de Crozon, au fort de Quélern, marquant ainsi la fin d’un chapitre difficile et mémorable de l’histoire de la construction du canal.

La Grande Tranchée en quelques questions
Pourquoi faire passer le canal à cet endroit si difficile ?
L’itinéraire conçu par l’ingénieur des Ponts et Chaussées Guy Joseph Bouessel en 1842 a été respecté pour relier les deux versants du canal, ceux du Blavet et de l’Aulne.
Les ouvriers du canal, étaient-ils tous des prisonniers ?
À Glomel, il devient vite clair qu'un grand nombre de travailleurs est nécessaire pour creuser cet ouvrage. Ainsi, des bagnards sont appelés dès le départ à rejoindre les équipes d'ouvriers libres. Cependant, tout au long de la construction du canal, ce sont principalement des ouvriers libres qui ont été mobilisés pour les travaux.
Les “bagnards” portaient un boulet au pied pour travailler ?
Absolument pas ! Bien que certains prisonniers forçats aient auparavant été assignés aux galères, où ils devaient porter un boulet au pied, ce n'était pas le cas à Glomel. En effet, il serait inconcevable qu'ils puissent travailler dans la tranchée dans cette situation !
Pour en savoir plus sur la Grande Tranchée et la vie des bagnards :
L'histoire des bagnards est relatée dans le livre de Jean Kergrist “Les bagnards du canal de Nantes à Brest”.

Où se rendre pour voir la Grande Tranchée ?
La Grande Tranchée est située sur le canal de Nantes à Brest, dans la commune de Glomel, entre le lieu-dit Créharer et le lieu-dit Pont-Lenn.
- Accès en voiture :
Pour vous rendre sur place, rendez-vous au parking "Pont Lenn, Glomel", situé sur le canal. À partir de là, il vous suffira de longer le canal à pied sur environ 500 mètres pour atteindre la Grande Tranchée. - Visites guidées :
L’association Cicindèle propose régulièrement des visites guidées du site durant l'été. D'autres visites ponctuelles peuvent également être organisées. Pour plus d'informations, consultez l’agenda du Kreiz Breizh.
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